dimanche 24 novembre 2013

Érotiques, philosophiques et fantastiques?

Après des années à circuler péniblement entre des centaines de poussettes et des milliers de visiteurs, j'ai enfin eu la chance de passer de l'autre côté en vivant ma première expérience d'auteure au Salon du livre de Montréal en fin de semaine. C'est une sensation merveilleuse de présenter aux lecteurs le fruit de tant d'efforts, de sueurs, d'inquiétudes et de joie avec, à ma droite, Suzanne Marinier, qui a réalisé les magnifiques illustrations des Petites histoires fantastiques, philosophiques et merdiques!

Avec la sexologue Julie Pelletier
Et c'était sans compter le plaisir d'avoir à ma gauche une fille aussi allumée et hilarante que la sexologue Julie Pelletier. À plus d'une reprise, les oreilles m'ont frisées devant les confidences candides que lui offraient sans gène des lectrices de passage. Son aura de confiance et d'ouverture doit lui servir à merveille lorsqu'elle reçoit sa clientèle en privée. Même Suzanne et moi étions sur le point de laisser échapper quelques révélations sur nous-mêmes lorsque l'apparition surprise de nos jules nous a coupé le sifflet et ramenées à l'ordre.

Extra-terrestre en pâmoison

En plus de ses livres "pratiques", Julie a signé pour le même éditeur que nous, Québec-Livres, deux recueils de nouvelles érotiques. Mon imagination débordante s'est emballée! J'ai alors eu une vision de Petites histoires fantastiques, philosophiques et ... érotiques! Dans ma candeur, j'ai proposé à Julie : " Nous pourrions échanger une histoire érotique dans notre prochain tome respectif... si tu me laisses y glisser un extra-terrestre!"

Suzanne à côté de son œuvre.
Hum... quelle idée inspirante. Je vais laisser l'application ouverte dans le bas de mon écran mental, là où s'accumulent déjà les synopsis du prochain livre d'histoires, lequel promet déjà d'être plus sombre et... sanglant. J'ai bien hâte de voir ce que cela va donner avec le crayon de Suzanne!


Personnage de livre 

Belle rencontre aussi avec Patricia Bittar, qui signait des dédicaces pour son savoureux roman Vol au-dessus d'un nid-de-poule, tiré de son passage dans mon arrondissement comme conseillère de la Ville. J'ai un attachement particulier pour ce livre, car j'y ai inspiré le personnage de Jacinthe J., la chargée de communications efficace aux "longs cheveux noirs ondulant autour de son visage". C'est la consécration littéraire cette année, il n'y a pas à redire!


jeudi 7 novembre 2013

La leçon de Maxime Chattam

Pendant des années, j'attendais le Salon du livre de Montréal avec impatience. Je consultais le programme plusieurs semaines à l'avance afin de planifier ma visite autour des séances de dédicace convoitées. Je prenais grand plaisir à offrir à mes parents les livres des auteurs les plus populaires du moment.

Cela me permettait de m'approcher des auteurs, ces créateurs que j'admirais - et que j'admire toujours - au plus haut point, car ils avaient réussi ce qui correspondait pour moi à l'un des accomplissements les plus gratifiants qui soit.

J'ai mis fin à la tradition pour deux raisons. La première, en raison du peu d'intérêt des principaux intéressés. Je m'explique. Un jour, au téléphone avec ma mère, je me suis inquiétée de son absence de réaction au sujet de l'un des derniers livres postés.

- Oui, oui, je l'ai bien reçu!

- Et alors? Étais-tu heureuse?

- Mmm, mmm...

- Mais, as-tu vu ce qu'il avait de spécial?

- Non. A-t-il quelque chose de spécial?

- Oui, pardi! J'ai fait la file plus d'une heure pour te l'obtenir!

- ....

- As-tu simplement remarqué ce qui était écrit dans les premières pages?

- Il n'y a rien d'écrit dans les premières pages!

- Bien sûr!

- Non, Josée. Je l'aurais remarqué!

Avec une pointe d'impatience, je lui demande d'aller le chercher. J'attends au téléphone en trépignant pendant qu'elle le feuillette.

- Il n'y a rien, confirme-t-elle. Je te l'avais dit.

- Mais oui, je répond presque en criant. Regarde à nouveau!

Ma mère s'exécute une deuxième fois. Tout à coup, elle s'exclame : "Ah, je vois maintenant! Tu as écrit quelque chose dedans!

- Ce n'est pas moi!!

- C'est qui, alors?

C'est une anecdote que j'adore raconter. Ma mère est délicieuse comme cela. Un jour, j'écrirai enfin ce projet de livre qui traîne depuis longtemps et qui contiendra une foule d'anecdotes semblables, dont un chapitre complet dédié aux perles maternelles. Heureusement, je sais que maman sera la première à en rire, car elle me demande souvent avec enthousiasme quand il sortira.

L'autre raison mentionnée en introduction, c'est le peu d'intérêt des auteurs eux-mêmes. Un chroniqueur littéraire dont j'ai oublié le nom m'a donné un jour raison dans un texte où il offrait un "guide de survie au Salon du livre". On y retrouvait, entre autres, le conseil suivant : "Apportez-vous de l'eau; des kilomètres de tapis, des milliers de livres et des centaines d'auteurs, tout cela est très sec."

C'est dommage, mais tout aussi vrai... Les auteurs affables se font plutôt rares. Ceux que l'on se plaît à imaginer avenants sont les plus décevants. Ils nous font sentir idiots  - voire pathétiques - de leur avoir rendu cet hommage non mérité.

Prendre la poudre d'escampette

Et cela, c'est quand nous avons la chance de les trouver à l'heure et au lieu convenus. Il est difficile de croire qu'un auteur dont l'éditeur a publicisé à grand frais la présence puisse prendre la poudre d'escampette en laissant ses lecteurs en plan. Pourtant, c'est une situation constatée à plusieurs reprises au fil des années, et même au Salon du livre de l'Estrie où j'ai effectué mes premières séances de dédicace pour mes "Petites histoires fantastiques, philosophiques et merdiques" en octobre dernier.

Plusieurs des grosses têtes d'affiche annoncées ont quitté en catimini sans même prévenir le personnel du kiosque une demi-heure et même une heure avant la fin de la période qui leur était attribuée. Cela m'a presque valu des coups de sacs à main de la part de lectrices déçues, qui me demandaient où était tel ou telle dont la chaise se trouvait vide à côté de moi...

Les plus grands sont les plus humbles

Ceci m'a rappelé ma rencontre avec l'auteur français Maxime Chattam voilà deux ou trois ans au Salon du livre de Montréal. Ses romans sont si percutants et d'une telle noirceur que je craignais pour ainsi dire de me trouver devant lui. Toutefois, l'idée d'obtenir sa dédicace me séduisant tant, que j'ai pris mon courage à deux mains et me suis placée au bout de la longue file.

Rendue devant lui, j'ai eu la surprise de découvrir un homme absolument charmant, agréable et lumineux, qui traitait ses lecteurs avec un respect remarquable et leur prêtait la plus grande attention. Dans mon enthousiasme, j'ai enfreins ma ligne de conduite, qui est de m'en tenir à l'essentiel par courtoisie pour les visiteurs suivants, et lui ai avoué avec candeur que j'écrivais moi aussi un livre (je n'arrive pas encore à y croire).

"Ah oui? De quoi parle-t-il?" m'a-t-il demandé avec un intérêt qui semblait parfaitement sincère. Je me suis lancée dans une courte description de mon projet pendant qu'il hochait la tête sans cesser de sourire.

Avez-vous seulement idée du nombre de fois qu'il peut entendre pareil boniment pendant ses sorties publiques? Cela ne l'a pas empêché de me féliciter et de me souhaiter la meilleure des chances.

Je suis repartie, toute guillerette, en serrant mon précieux livre Léviatemps sous le bras. Un peu plus loin, la curiosité m'a fait rouvrir les premières pages pour découvrir le contenu de la dédicace : 

 
Pour Josée, 
Ce voyage dans le temps, 
vus le Léviatemps!
D'un auteur à un autre!
Maxime Chattam


Voilà l'étoffe d'un grand. C'est aussi un excellent exemple de l'effet durable qu'il est possible d'avoir sur autrui en quelques secondes, simplement en faisant preuve de générosité, en offrant une écoute attentionnée.

Bien sûr, l'effet contraire est aussi vrai. C'est la leçon que j'ai gardée en tête pendant mon passage au Salon de l'Estrie. Elle me motivera également pendant le Salon du livre de Montréal, où je serai les 22 et 23 novembre prochains.

Encore plus en cette ère où la survie du livre est menacée, tout comme la notion de droit d'auteur, chaque lecteur mérite d'être accueilli avec la plus grande considération.